BREVE DU 30 MARS AU 5 AVRIL 2020

Bonjour, voici un résumé de l’actualité de cette semaine, prenez soin de vous et bonne lecture !

 

L’exclusion des OEM à l’action en contrefaçon :

 

Les OEM (Original Equipment Manufacturer), ou FEO en français (Fabriquant d’Equipement d’Origine), sont des entreprises spéciales. Celles-ci sont chargées de la fabrication des pièces détachées pour une autre entreprise. Une définition plus simpliste viserait à dire que ce sont des équipementiers. Ils sont très présents sur le territoire chinois. Mais, leurs produits étant en principe exclusivement destinés à l’exportation, la Chine a longtemps considéré qu’ils ne pouvaient faire l’objet d’aucune action en contrefaçon. Considérant que l’usage d’une marque sur des produits ayant pour unique vocation à être exportés, ne serait pas susceptible de constituer une contrefaçon. Cette vision a été renouvelée par les juges de la Cour Suprême de Chine en 2019, dans un arrêt Honda.

 

La situation antérieure à l’affaire Honda :

La Cour Suprême de Chine se fondait auparavant sur la fonction principale d’une marque qui était d’informer les consommateurs sur l’origine des produits qu’elle désigne. Les juges chinois ont considéré, dans deux arrêts Pretul et Dongfeng de 2015 et 2018 que cette fonction n’était pas assurée par la marque apposée sur des produits ayant pour unique vocation à être exportés hors de la Chine. Etant donné que ces produits ne sont pas destinés à rester sur le territoire chinois, ils ne devraient pas entrer en contact avec la population chinoise. Par conséquent, il n’y aurait aucun risque de confusion avec d’autres marques similaires ou identiques. L’apposition d’une marque sur un produit OEM ne pourrait donc pas être considérée comme un « usage de la marque » au sens de la loi chinoise. Il ne pourrait donc y avoir contrefaçon. Cette solution est contestable et a été fortement contestée puisqu’en réalité, bien que les produits OEM soient exclusivement destinés à être exportés à l’étranger, rien ne garanti qu’ils ne reviendront jamais sur le territoire chinois. Ces contestations ont donné lieu à un revirement de jurisprudence en Septembre 2019.

 

Le revirement de jurisprudence de l’affaire Honda :

En l’espèce, la société Honda était propriétaire de la marque « Honda » en Chine. La société Heng Sheng, société OEM, fabriquait des motos destinées à être exportées en Birmanie. Le problème étant que ces produits portaient la marque « Hondakit », qui était communément raccourcis à l’appellation « Honda ». C’est pourquoi la société Honda a assigné, en contrefaçon, l’OEM Heng Sheng qui pensait évidemment avoir gagné le procès d’avance. D’ailleurs, les premiers juges leur ont donné un faux espoir en refusant de caractériser la contrefaçon, conformément au principe admis jusqu’ici. Pourtant, la société Honda a tout de même mené le procès jusqu’à la Cour Suprême de Chine. La société a pris un énorme risque financier étant donné que le principe de l’exclusion des OEM à la contrefaçon venait d’être réaffirmé moins d’un an auparavant. Mais ce risque a finalement porté ses fruits puisque la Cour Suprême de Chine a fait tomber le principe qu’elle avait posé jusqu’à présent en acceptant le recours.

 

Désormais, les OEM ne sont plus exclus par principe de l’action en contrefaçon. Les juges vont opérer une appréciation in concreto, au cas par cas. Cette solution est assez compréhensible aux vues du développement du numérique partout dans le monde. Avec le développement du commerce électronique et internet, il est fort possible que les produits OEM reviennent sur le marché chinois. De plus, avec le développement de l’économie, les consommateurs chinois voyagent de plus en plus dans des pays étrangers. Ils risquent alors d’entrer en contact avec des produits OEM, ce qui causerait un risque de confusion. Cette décision, bien que compréhensible mène tout de même à une certaine insécurité juridique. Il nous reste donc à attendre les prochaines décisions de la Cour Suprême de Chine en la matière, afin de voir quel raisonnement va perdurer.

 

Sources :

https://chinepi.com/industrie-oem-la-cour-supreme-change-de-cap/

https://chinepi.com/non-lusage-dune-marque-sur-des-produits-a-exporter-nest-pas-une-contrefacon-en-chine/

 

 

L’attestation dérogatoire de sortie enfin disponible en version numérique :

 

L’attestation dérogatoire est disponible dès le 6 avril en format numérique. Les autorités auront à scanner le QR code généré par l’inscription sur le site officiel du gouvernement. Aucune application ne peut se substituer à l’utilisation du site gouvernemental.

Aujourd’hui, 77% de la population française est dotée d’un smartphone, c’est la raison d’une telle alternative à la version papier.

Tweet du ministère de l’intérieur, 2 avril 2020

Tout d’abord, il faut entrer l’adresse du formulaire sur un navigateur (celle-ci sera communiquée le 6 avril). Puis, il suffit d’entrer les informations requises à la validité de l’attestation, de l’envoyer sur une adresse mail par ordinateur ou de cliquer sur « générer mon attestation » par smartphone, pour enfin télécharger celle-ci au format PDF.

Les serveurs du gouvernement garantissent qu’aucune information personnelle n’est conservée lorsque l’attestation numérique est générée. Ainsi, le vol de données serait évité par cette faculté. La version de test de l’attestation, démontre que l’opération ne sollicite pas le transfert des informations sensibles à un serveur tiers.

Cependant les informations entrées dans l’ordinateur ou le smartphone semblent conservées dans le cache du navigateur sollicité au moment où l’attestation est générée.

L’horodatage a un rôle primordial. Il est généré de façon automatique et témoigne du moment ou l’individu a rempli l’attestation. Cette dernière permet d’éviter la fraude, et de garantir que l’attestation est bien générée par avance.

L’avantage de la pratique du scan est qu’il permet de conserver une distance, et évite le contact physique entre les individus et les autorités effectuant un contrôle qui n’ont plus a toucher de papier. Cela limite la prise de risques sanitaires pour les individus comme pour les autorités.

 

Sources :

https://siecledigital.fr/2020/04/03/covid-19-une-attestation-numerique-est-prevue-par-le-ministere-de-linterieur/

https://www.numerama.com/tech/615592-coronavirus-finalement-une-attestation-smartphone-sera-disponible-le-6-avril.html

 

 

Les utilisateurs de l’application de visioconférence Zoom victimes de piratage :

 

Au regard du contexte actuel, le nombre de téléchargements de l’application de visioconférence zoom a explosé. En effet, eu égard aux mesures de confinement, on a été témoin d’une généralisation massive du télétravail, d’où une forte croissance de l’utilisation de cet application : + 252% rien que pour la semaine du 16 mars, puis on a assisté encore à une nette augmentation de 66% la semaine d’après pour atteindre les 7 millions de téléchargements. A ce titre, il était évident pour la procureure de l’État de New-York de s’assurer que toutes les mesures avait été prises pour garantir la vie privée et la sécurité de chacun des utilisateurs.

 

Cette démarche fait suite aux nombreuses plaintes véhiculées par le hashtag #zoombombed sur les réseaux sociaux, qui dénonce l’apparition d’images à caractère pornographique et raciste au beau milieu de téléconférence. Par exemple, on peut citer l’irruption d’un individu pendant une classe virtuelle qui a mené à l’interruption du cours puisqu’il insultait délibérément l’enseignant tout en révélant des données qui lui étaient personnelles.

Il est donc vivement conseillé aux utilisateurs de régler l’application en privatisant les réunions et en évitant les partages d’écran afin d’éviter tous désagréments.

 

Source :

https://www.lexpress.fr/actualite/monde/amerique-nord/les-utilisateurs-de-l-application-de-visioconference-zoom-victimes-de-piratages_2122617.html

 

 

Droit au déréférencement : le Conseil d’État tire les conséquences des arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne :

 

Le conseil d’État a rendu ce 27 mars 2020 la décision qui clôture le recours intenté par Google contre la décision de la CNIL qui lui enjoignait de procéder à un déréférencement mondial lorsqu’elle était saisie d’une demande de droit à l’oubli. La CNIL prend acte de cette décision qui tire les conséquences automatiques de l’arrêt de la CJUE du 24 septembre 2019.

Le droit au déréférencement permet à toute personne de demander à un moteur de recherche de supprimer certains résultats qui apparaissent à partir d’une requête faite sur ses nom et prénom. Cette suppression ne signifie pas l’effacement de l’information sur le site internet source.

En 2016, la Commission avait prononcé une sanction pécuniaire publique à l’encontre de la société Google qui ne s’était pas conformée à une mise en demeure de la Présidente de la CNIL, de rendre effectif le déréférencement sur l’ensemble des versions nationales de son moteur de recherche Google Search. Pour la CNIL, lorsqu’il était fait droit à la demande d’une personne, seul un déréférencement mondial était de nature à permettre une protection effective des droits des personnes.

La société Google avait alors saisi le Conseil d’État au motif que les mesures adoptées depuis mars 2016 étaient suffisantes, à savoir un mécanisme de redirection automatique vers la version nationale du site utilisé par l’internaute et un blocage de l’accès à un contenu déréférencé, à tout internaute identifié comme localisé sur ce territoire.

Le conseil d’État avait rendu une première décision renvoyant l’affaire devant la Cour de justice de l’Union européenne, à charge pour celle-ci de préciser si le droit à l’oubli, lorsqu’il est exercé, a une portée nationale, européenne ou mondiale.

Dans sa décision du 24 septembre 2019, la Cour avait apporté des précisions sur la portée territoriale à donner à un déréférencement prononcé sur le fondement du droit de l’Union. Ce qu’il faut retenir de cet arrêt c’est que :

  • Le droit à l’oubli n’a pas systématiquement une portée mondiale ;
  • Il a cependant une dimension systématiquement européenne (et pas seulement nationale) ;
  • Il peut recevoir une application mondiale dans certains cas.

En effet, selon la décision de la CNIL de 2016, la condamnation repose non pas sur une analyse individuelle du cas d’espèce, mais bien sur une position de principe selon laquelle le droit à l’oubli engendre de façon systématique des conséquences au niveau mondial. C’est la raison pour laquelle le Conseil d’État annule la sanction de la CNIL.

Ainsi, dans sa décision du 27 mars 2020, le Conseil d’État applique la règle issue de l’arrêt de la CJUE du 24 septembre 2019 et précise les marges de manœuvre de la Commission pour protéger efficacement les personnes :

  • Le Conseil d’État rappelle que le manquement reproché à la société Google doit être jugé selon les dispositions de la loi du 6 janvier 1978 modifiée transposant la directive du 24 octobre 1995, la sanction de la CNIL datant de 2016.
  • Ensuite, le Conseil d’État rappelle le principe du déréférencement européen (avant l’intervention de la CNIL, le déréférencement était limité au pays du demandeur).
  • Enfin,le Conseil prend acte que le législateur français n’a pas adopté de dispositions spéciales permettant, en France, à la CNIL d’opérer un déréférencement excédant le champ prévu par le droit de l’Union. En l’absence d’intervention du législateur, la CNIL ne peut dès lors qu’ordonner un déréférencement européen.
  • Ainsi, la CNIL ne pouvait pas ordonner un déréférencement mondial, au lieu d’un déréférencement européen et de ce fait, la sanction prononcée par la CNIL est annulée.

 

Source :

CNIL https://www.cnil.fr/fr/droit-au-dereferencement-le-conseil-detat-tire-les-consequences-des-arrets-de-la-cour-de-justice-de

 

 

L’IA, un allié de la Santé :

 

Notre société fait aujourd’hui face à un grand défi et oblige une partie de la population mondiale à rester enfermée chez elle, dans l’espoir de voir ralentir la progression de cette épidémie. Il apparait que dans ce combat, l’humanité peut compter sur l’aide de l’intelligence artificielle.

Celle-ci avait au commencement détecté l’apparition du virus. En effet BlueDot, start-up canadienne spécialisée dans l’intelligence artificielle, a repéré le problème sanitaire grâce à son algorithme, permettant notamment de croiser des données relatives au trafic aérien et aux articles de presse, et a ainsi tenté d’en analyser la propagation.

Par la suite, la filiale santé de la société chinoise Alibaba a développé une IA capable de détecter avec une vitesse incomparable ( moins de 20 secondes ), les contaminations au virus et qui serait efficace à hauteur de 96%. Celle-ci a été entrainée a repérer certains éléments caractéristiques de la maladie dans un grands nombre d’imageries et de données médicales.

 

Si l’IA permet à la Chine de mener sa campagne contre la propagation du virus, le professeur Daniel Cohen, lui trouve en France une nouvelle utilité: la recherche de médicaments capable de combattre une telle maladie. L’IA permet en effet de combiner les éléments relatifs aux caractéristiques du virus et les éléments connus pour combattre ceux-ci afin de peut être trouver une combinaison satisfaisante.

Cette technologie lui a ainsi permis d’identifier une centaine de médicaments, traitant des maladies courantes, qui seraient, peut être, en mesure de combattre ce virus.

Cette crise sanitaire semble ainsi démontrer l’utilité de l’IA en matière de santé, mais elle pose également la question de la protection des données. En effet si l’IA est un progrès, elle nécessite des données publiques mais également privées pour fonctionner de manière efficace et traiter de telles crises: géolocalisation, achats en tout genre … Il apparait ainsi que le droit doit aujourd’hui trouver un juste milieu dans la balance opposant la lutte pour la protection des données personnelles et le développement de l’IA.

 

Sources :

https://www.lepoint.fr/editos-du-point/anne-jeanblanc/traitement-du-coronavirus-les-bonnes-recettes-du-pr-cohen-23-03-2020-2368327_57.php#

https://www.20minutes.fr/high-tech/2732679-20200304-une-ia-capable-de-detecter-le-coronavirus-en-moins-de-20-secondes

https://marseille.latribune.fr/idees/2020-03-25/la-lutte-contre-le-coronavirus-entre-utilisation-de-l-intelligence-artificielle-et-protection-des-libertes-individuelles-843339.html

https://www.boursorama.com/actualite-economique/actualites/coronavirus-mais-que-fait-l-intelligence-artificielle-f862003eafae60ab6a3b0badd6870266

http://theconversation.com/predire-la-propagation-du-coronavirus-grace-a-lintelligence-artificielle-133289

 

 

Merci à Isabelle Jallageas,, Haykuhi Gzirants, Laure Desquine, ainsi qu’à Mounia Berranen et Sarah Second du collectif pour la rédaction.

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