BREVE DU 8 AU 15 DECEMBRE 2019

Bonjour,

Voici un résumé de l’actualité de cette semaine en IP/IT, bonne lecture.

« I need this on a t-shirt », ou comment les artistes ont utilisés les robots contre les sites de contrefaçon :

Ces dernières semaines, les artistes d’internet se sont vengés contre les sites de contrefaçon qui, depuis des années, volent leurs œuvres sur internet.

En effet, ces derniers emploient massivement des robots qui parcourent les réseaux sociaux à la recherche de phrases clés dans les sections commentaires des images partagées par les internautes, afin de mettre en circulation sur leurs magasins des copies contrefaites de ces images, souvent sur des vêtements, coque de smartphone et autres produits dérivés.

Cependant, il est facile d’exploiter les comportements mécaniques des robots : des artistes se sont en effet rendu compte que ces derniers réagissaient systématiquement lorsque la phrase « I want this on a T-shirt » était répétée plusieurs fois, et en ont profité pour faire circuler des illustrations contenant des phrases comme : « ce site vends des œuvres volées, n’achetez rien chez eux ! ».

 

 

Exemple par @Hannahdouken sur twitter

 

La contrefaçon utilisant le motif précédent

 

Devant le succès de ces pratiques, d’autres internautes ont poussé le concept encore plus loin : en ajoutant aux dessins contrefaits des œuvres ou des marques appartenant à de grandes entreprises, ils espèrent canaliser les moyens juridiques de ces entreprises contre les sites de contrefaçon. Certains vont plus loin encore en faisant circuler des messages critiquant la Chine pour ses atteintes aux droits de l’Homme, la nation étant très sensible sur ces questions.

 

Motif contenant diverses inscriptions contre la République Populaire de Chine

 

A gauche, un T-Shirt avec l’inscription « cercle d’invocation de l’action en contrefaçon » ; A droite, un motif de Mario, Mickey et Bart Simpson avec l’inscription « Atteinte aux droits d’auteurs »

 

Si de nombreux sites se sont débarrassés de ces motifs à l’heure actuelle, d’autres les ont laissés en circulations, certains de ces motifs étant, ironiquement, devenus populaires auprès de certains internautes. Encore une fois, le serpent se mord la queue.

 

 

Sources :

Alexandre Phalippou, 6 décembre 2019, « « I need this on a shirt » : l’idée géniale pour prendre les sites de contrefaçon à leur propre piège », L’Obs (https://www.nouvelobs.com/high-tech/20191206.OBS22005/i-need-this-on-a-shirt-l-idee-geniale-pour-prendre-les-sites-de-contrefacon-a-leur-propre-piege.html#)

L’Ermite Moderne, 12 Décembre 2019, « Piéger les Bots voleurs d’arts pour trafic de T-shirts », Chaine Youtube de l’Ermite Moderne (https://www.youtube.com/watch?v=T60QA0GiRtk)

 

 

Le stockage d’ADN permet de cacher des données dans n’importe quel objet

Une expérience vient de démontrer la possibilité de stocker des données sous forme d’ADN synthétique, à l’intérieur des objets du quotidien. En effet, cette découverte fait suite à la volonté d’améliorer les nouvelles méthodes de stockage durables et qui utiliseraient moins d’énergie. Un des grands avantages de l’ADN réside dans le fait qu’il peut accueillir énormément de quantités d’informations et ce, de manière condensée.

L’équipe en charge explique que cette découverte résulte de la synthétisation des molécules d’ADN en codant les plans du célèbre « Stanford Bunny » afin de répliquer  le lapin à partir de l’ADN stockée. Il s’avère que les informations extraites ont effectivement permis de fabriquer de nouveaux lapins, démontrant une préservation certaine des données.

Selon le professeur Yaniv Erlich, qui est associé au projet, une telle technique permettrait sans aucun doute de conserver les données pendant des décennies voire davantage. En outre, la reproduction des lapins, en l’espèce, pourrait s’effectuer un quadrillon de fois sans endommager aucune donnée ce qui est remarquable.

Ainsi, cela ouvre de nombreuses perspectives. Si pour l’instant, la réplique a été produite manuellement, la prochaine étape est d’arriver à effectuer une réplique sans intervention humaine !

Sources:

https://www.lebigdata.fr/stockage-adn-donnees-objet

La Chine veut supprimer les logiciels et ordinateurs étrangers de ses administrations

On se souvient cet été que Huawei et d’autres sociétés chinoises avaient été placées sur  la  liste noire du Bureau de l’Industrie et de la Sécurité (BIS) du département du Commerce des États-Unis. Ce dossier avait fait grand bruit tant les conséquences entre les deux pays, la Chine et les États-Unis étaient grandes en terme d’échange et de commerce.

La réponse de l’administration chinoise se faisait attendre et celle-ci est ferme. En effet selon une directive officielle demeurée encore non-publié, 30% des logiciels et ordinateurs étrangers utilisés par les administrations chinoises devront être supprimés dès l’an prochain.

C’est donc dans une guerre commerciale que Pékin et Washington se sont engagés. Même si le texte ne vise et ne cite pas particulièrement les sociétés américaines en question on peut d’ores et déjà penser à Dell, HP, Microsoft qui seront progressivement exclus d’un marché juteux estimé à 150 milliards de dollars.

Selon le Financial Times, il est également difficile de définir ce qu’est un « produit national » dans ce contexte. Car, bien que Lenovo soit une société chinoise qui assemble de nombreux produits en Chine, ses processeurs informatiques sont fabriqués par Intel et ses disques durs par Samsung. Il serait encore difficile pour l’industrie nationale de se passer des produits des fournisseurs de semi-conducteurs tels que comme Intel Corp. et Nvidia Corp. ainsi que des logiciels de Microsoft Corp. et Apple Inc.

La Chine favorise ici ses entreprises nationales tel que Lenovo et Huawei et comble ainsi le manque à gagner occasionné par le décret du Président Donald Trump publié en mai dernier qui empêche des entreprises de télécommunications chinoises telles que Huawei de vendre du matériel aux États-Unis, visant à neutraliser la capacité de Beijing à compromettre les réseaux sans fil et les systèmes informatiques américains de la prochaine génération.

Car oui, au-delà du protectionnisme il est aussi question de contrôle des données car confier les hardwares et le softwares faisant transiter des données très sensibles à ses concurrents et rivaux c’est prendre un risque énorme. La Chine et les États-Unis veulent ainsi utiliser chacun de leur côté des technologies sûres et contrôlables par le gouvernement pour assurer un meilleur transit et contrôle des données.

 

L’idée principale demeure toujours la même : la compétitivité. La Chine s’emploie à développer ses propres logiciels et outils informatiques pendant que les États-Unis luttent à conserver leur place de leader dans le domaine.

Sources :

https://www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/la-chine-veut-supprimer-tous-les-logiciels-etrangers-de-son-administration-dici-a-2022-1154758

https://www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/huawei-de-nouvelles-restrictions-tacites-imposees-aux-operateurs-telecoms-1154439

https://droit.developpez.com/actu/286881/La-Chine-demande-aux-bureaux-du-gouvernement-de-supprimer-tout-le-materiel-et-logiciels-etrangers-dans-un-elan-d-incitation-a-l-utilisation-des-technologies-locales-d-apres-un-rapport/

https://information.tv5monde.com/info/chine-le-gouvernement-veut-remplacer-les-ordinateurs-et-logiciels-etrangers-dans-son

Précision de l’intérêt à agir relatif au droit de divulgation de l’œuvre post-mortem à son auteur : décision de la Cour de cassation du 27 novembre 2019

En droit de la propriété intellectuelle, le droit de divulgation de l’œuvre correspond au « don de l’œuvre au public ». Ce n’est qu’après la diffusion de l’œuvre, que les titulaires de droits peuvent librement envisager l’exploitation et faire valoir leurs droits en succession.

Un arrêt est rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 27 novembre 2019, publié sous la mention élevée « F P B I » dans la hiérarchie des arrêts de la haute Cour.

Les faits sont les suivants. Une association et sa présidente se prévalent du trouble manifestement illicite causé par l’impossibilité d’organiser une exposition. Cela en raison de l’absence d’héritier ou légataire de l’artiste-peinte décédé, les œuvres de ce dernier étant en la possession d’un tiers au moment du litige.

Suite à cela, les demanderesses souhaitent obtenir la remise des œuvres par le tiers et invoquent leur détention frauduleuse par ce dernier. L’arrêt rendu par les juges du fond déboute les demanderesses pour irrecevabilité.

La Cour de cassation rappelle par un visa des articles 31 du CPC et 121-3 du CPI*, le fait que l’intérêt à agir prévu en droit commun de la procédure civile, ne nécessite pas forcément que le bien-fondé de l’action en justice soit démontré au préalable, cela s’appliquant au droit de divulgation de l’œuvre du défunt.

Selon Nicolas Cayrol, les juges du fond ne doit pas statuer sur le bien-fondé en droit de l’action en justice, mais il était tenu de statuer sur l’intérêt à agir, juridiquement recevable en l’espèce car les droits de divulgation n’étaient pas détenus ni par le tiers en possession des œuvres ni par les demanderesses au pourvoi.

Dans le cas de l’existence d’un abus ou d’un mésusage du droit de divulgation par les ayant-droit, le Tribunal de Grande Instance dispose de la faculté de prendre une mesure appropriée.

L’article 121-3 du code de propriété intellectuelle ne détermine pas avec certitude l’étendue des personnes pouvant agir en cas d’abus ou de mésusage par les ayant-droit du défunt.

En effet, cette décision précise à qui l’intérêt à agir peut être reconnu, et élargit la défense du droit de divulgation. En l’espèce, l’association devrait être recevable à l’action. Cependant, le doute subsiste sur l’effectivité de cette décision aux droits moraux de l’auteur, autres que le droit de divulgation.

Sources

*Article 31 du code de procédure civile. https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006410125&cidTexte=LEGITEXT000006070716&dateTexte=19760101

Article 121-3 du code de propriété intellectuelle. https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006278893&cidTexte=LEGITEXT000006069414&dateTexte=19920703

-Pierre Noual docteur en droit et historien de l’art, Dalloz actualité, 10 décembre 2019. https://www-dalloz-actualite-fr.proxy.scd.u-psud.fr/flash/action-en-justice-et-droit-de-divulgation-post-mortem-clarification-sur-l-interet-agir#.XfTQIPzjLIU

Conseil constitutionnel : toujours pas de captation des débats, mais un nouveau droit accordé aux journalistes

Nous vous en parlions il y a quelques semaines : le Conseil constitutionnel avait trois mois pour statuer sur la question prioritaire de constitutionnalité posée par le magazine Paris Match dans le cadre de sa condamnation à une amende pour avoir publié des photographies prises pendant l’audience du procès d’Abdelkader Merah. Les Sages ont ainsi rendu leur verdict le 6 décembre, sur la question de savoir si l’article 38 ter de la loi de 1881 interdisant l’enregistrement du son et de l’image pendant les audiences constituait une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression et de communication.

Les enjeux juridiques étaient de taille, le journal estimant que de telles captations pouvaient raisonnablement s’effectuer sans troubler la sérénité des débats, sans porter une atteinte excessive aux droits des parties, ni menacer l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire. Considérant pourtant que le texte visé prévient tout risque de trouble au cours d’une audience, le respect de la présomption d’innocence et le droit à la vie privée, le Conseil constitutionnel l’a déclaré conforme à la Constitution.

Pourtant, la décision des juges est à nuancer sur un point qui réjouit particulièrement l’association de la presse judiciaire s’étant jointe au recours de Paris Match : s’ils interdisent toute forme de captation, ils rendent néanmoins possible tout autre moyen de rendre compte des débats pendant leur déroulement. Une exception offrant implicitement aux journalistes le droit d’en réaliser des croquis, ou encore de les « live-tweeter ».

Source :

https://www.dalloz-actualite.fr/flash/conseil-constitutionnel-reconnait-droit-de-live-tweeter-audiences#.XfU9E25FzIV

Merci au collectif et un grand merci à Pauline Roth pour sa fidèle contribution.

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