La protection intellectuelle à l’aune des algorithmes et du numérique

Aujourd’hui, personne ne peut passer à côté de l’ère numérique. Cependant, il existe un certain manque de sensibilisation des entreprises concernant la protection de leurs inventions ou savoir-faire numériques.

Les entreprises peuvent bénéficier de la protection par le droit d’auteur, par le brevet ou par le secret de leurs inventions incluant des algorithmes, ou encore des logiciels.

 

Le droit d’auteur, une protection efficace en théorie

 

Le droit d’auteur protège des œuvres littéraires, des créations musicales, graphiques et plastiques, mais aussi des logiciels, des créations de mode… Son champ d’action est plutôt large. Néanmoins, il ne protège pas les idées ou les concepts.

C’est un droit qui s’acquiert du fait même de la création de l’œuvre, mais celle-ci doit être originale, c’est-à-dire qu’elle doit porter la marque de la personnalité de son auteur. De plus, ce dernier doit être en mesure d’apporter la preuve de la date à laquelle son œuvre a été créée en cas de litige.

Alors que l’algorithme du logiciel est protégé par le droit d’auteur, il ne peut être breveté, conformément au Code de la propriété intellectuelle. Solution qui apporte son lot de critiques : pour certains, le droit d’auteur ne serait pas assez protecteur car il n’offre aucune protection contre la copie, et pour d’autres, le droit d’auteur serait un frein à la créativité numérique.

L’autre faiblesse de la protection par le droit d’auteur serait la preuve de l’originalité, de l’empreinte de la personnalité de l’auteur du code informatique car ce n’est qu’une succession de formules mathématiques.

Néanmoins, la protection par le droit d’auteur présente quelques avantages : la simplicité de la procédure car elle ne requiert aucun enregistrement ou dépôt, la protection est donc automatique. Cependant, ces avantages ne permettent pas la pleine reconnaissance du droit d’auteur comme une protection performante.

 

Le brevet, une protection sur le fond

 

Selon le Code de la propriété intellectuelle, dans son article L.611-10, « Ne sont pas considérées comme des inventions […] les découvertes ainsi que les théories scientifiques et les méthodes mathématiques […]. », les algorithmes, les codes informatiques et les logiciels en tant que tels étant considérés comme des méthodes mathématiques sont donc exclus de la protection par le brevet.

Néanmoins, il est possible de breveter l’invention contenant les codes informatiques ou algorithmes.

Cette protection par le brevet est soumise à plusieurs conditions, comme en matière de droit d’auteur. L’invention doit être nouvelle, doit impliquer une activité inventive et doit être susceptible d’application industrielle, comme le mentionne l’article L.611-10 du Code de la propriété intellectuelle dans son premier alinéa.

En matière de logiciels, il est impératif de faire attention aux exigences relatives à l’objet brevetable et à l’activité inventive qui ne sont pas évidents dans ce cas. Le brevet est uniquement délivré pour une invention décrite comme une solution à un problème technique. Il est donc important pour les entreprises de trouver une bonne invention contenant les codes informatiques et de bien formuler la demande de brevet, notamment dans la rubrique des « revendications » qui permettra alors d’éviter le rejet de la demande de brevet.

En France, la brevetabilité est acceptée sur l’ensemble d’un logiciel appartenant à une invention plus vaste puisque le brevet portera sur un procédé inventif incluant un logiciel pour son bon fonctionnement.

Néanmoins, le brevet reste une protection complexe et coûteuse. En effet, il faut nécessairement effectuer un dépôt à l’INPI, qui examinera la demande, et qui délivrera par la suite le brevet, moyennant une redevance.

Le droit des brevets protège le fond, c’est-à-dire l’invention dotée d’algorithmes, mais ne protège pas la forme : le logiciel en tant que tel. Malgré son efficacité hors pair, notamment dans la fonction de rassurer les investisseurs, la protection par le brevet n’est pas complète.

 

Le secret, une protection dangereuse

 

En matière d’algorithmes et de logiciel, la règle est le secret, mais cela a un prix : « Garder une invention secrète, c’est tout sauf ne rien faire. Il faut entamer des démarches de sensibilisation, signer des accords de confidentialité, cela a un coût, en temps et en argent, mais aussi en matière de gestion. », Julien Pénin, professeur à la faculté de Strasbourg.

Selon l’INPI, le secret consiste « à ne pas diffuser dans le public les connaissances élaborées ou acquises ». Il a été récemment consacré par la loi n°2018-670 du 30 juillet 2018.

Cette méthode est sans limite de temps tant que le secret existe et aucune procédure en propriété industrielle n’a besoin d’être engagé. Néanmoins, le secret n’est pas un droit exclusif et demande une forte implication de toute l’entreprise.

Le secret serait donc une bonne méthode pour protéger les algorithmes puisqu’il y a continuellement un flux constant de données. Mais elle serait imparfaite compte tenu des efforts que doit fournir l’entreprise pour protéger ses algorithmes.

 

Il n’existe pas de méthode parfaite, de stratégie notable pour protéger les codes informatiques, les algorithmes et donc les logiciels. Faudrait-il alors adapter le droit aux inventions numériques ? Innovation et propriété intellectuelle ne s’opposent pas. Cependant aucune réforme ou proposition n’est prévue à ce jour.

 

Manon Hottin

 

Sources :

https://www.lesechos.fr/thema/articles/la-protection-intellectuelle-a-lheure-des-algorithmes-et-du-numerique-133237

https://www.inpi.fr/fr/comprendre-la-propriete-intellectuelle/les-autres-modes-de-protection/le-droit-dauteur

https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=08062C5965B4E71177E6E182E6BAB98E.tpdila11v_3?idArticle=LEGIARTI000019298703&cidTexte=LEGITEXT000006069414

https://www.inpi.fr/fr/comprendre-la-propriete-intellectuelle/le-brevet

https://www.wipo.int/sme/fr/documents/software_patents.htm

Séminaires de Madame Julie Groffe en Propriété Industrielle et de Madame Pauline Léger en Propriété Littéraire et Artistique

https://www.app.asso.fr/centre-information/base-de-connaissances/les-grands-themes/logiciels/faq-peut-on-proteger-un-logiciel-par-un-brevet

https://www.inpi.fr/fr/proteger-vos-creations/proteger-votre-creation-technique/les-etapes-cles-du-depot-de-brevet

https://www.inpi.fr/fr/comprendre-la-propriete-intellectuelle/les-autres-modes-de-protection/le-secret

https://www.lescahiersdelinnovation.com/innovation-propriete-intellectuelle-faut-proteger-partager-innovations/

https://www.chefdentreprise.com/Thematique/juridique-1055/Breves/Propriete-intellectuelle-avez-vous-pense-votre-patrimoine-immateriel-343210.htm

https://www.lagbd.org/index.php?title=G%C3%A9rer_et_prot%C3%A9ger_ses_donn%C3%A9es_%C3%A0_l%E2%80%99%C3%A8re_du_num%C3%A9rique_:_un_imp%C3%A9ratif_de_bonne_gouvernance_pour_l%E2%80%99entreprise_(fr)&mobileaction=toggle_view_mobile

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