Brève du 20 au 26 janvier 2020

Bonsoir à tous, voici le point d’actualité de la semaine !

 

Haribo protège son ours !

Une start-up espagnole s’est récemment attirée les foudres d’Haribo après avoir lancé la commercialisation d’ours en gélatine imbibés d’alcool. En effet, le marque nommée « Ositos con alcohol » a été mise en demeure par l’entreprise allemande afin de cesser la production de ses bonbons, jugés trop ressemblants aux leurs.

Bonbons « Ours d’or » fabriqués par Haribo Source : site stock-bureau.fr

Bonbon fabriqué par la start-up Source : Instagram ositosconalcohol

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ainsi, un règlement amiable du litige à l’initiative de la marque a été proposé aux trois jeunes entrepreneurs espagnols qui l’ont refusé. En effet, ils y voient une volonté d’Haribo de « sapproprier leur création» puisque le confiseur leur réclame«d’arrêter de produire et de vendre tout produit sous le symbole en litige, d’abandonner leur marque déposée en Espagne et d’accepter de transférer la gestion et la propriété du domaine ositosconalcohol.com à Haribo». C’est la raison pour laquelle, malgré leur peur de ne pas avoir les moyens financiers d’affronter un tel géant, ils ont pris la décision de continuer la commercialisation de leurs produits, estimant que leurs ours “ne se ressemblent pas”.

Les ours d’or Haribo sont commercialisés depuis 1960 et ont fait l’objet d’un premier dépôt à titre de marque à l’Office allemand des brevets et des marques en 1967. Ils sont l’un des symboles emblématiques de la marque et de ce fait ce n’est pas la première fois qu’Haribo cherche à le défendre. A titre d’exemple, la marque suisse Lindt avait été attaquée en justice par Haribo en 2012, pour avoir commercialisé des ours en chocolat emballés dans un papier doré. Après avoir obtenu gain de cause en première instance, Haribo est finalement débouté de sa demande en 2015 par la Cour fédérale de justice, plus haute juridiction allemande, car l’ours Lindt «ne représente pas une atteinte ni à la marque ‘L’ours d’or’ de Haribo ni une imitation illicite des produits gélifiés».

Sources :

 

La création d’une intelligence artificielle protégée par le droit d’auteur 

Selon Marvin Lee Minsky, l’intelligence artificielle (IA) est « la construction de programmes informatiques qui remplacerait une partie des tâches intellectuelles, effectuées pour l’instant par l’homme ». L’IA, terme conçu par John McCarthy, occupe une place de plus en plus importante dans notre société et conduit à se poser des questions, notamment en termes de protection des créations d’une IA. Ainsi, il est légitime de se demander si la création d’une IA peut-elle être protégée par le droit d’auteur ?

Le tribunal chinois de Shenzhen est venu apporter une réponse allant à l’encontre de la définition de la notion d’originalité en affirmant qu’une création d’une intelligence artificielle pouvait être protégée par un droit d’auteur. En l’espèce, l’entreprise Tencent a développé une IA dénommée « Dreamwritter » en 2015. Celle-ci rédige automatiquement des rapports et des articles sur le monde de la finance et des affaires publiés ensuite sur le site Tencent Securities. Le 20 août 2018, l’IA a écrit un rapport sur Shanghai. Or, en 2018, l’entreprise Shanghai Yingxun Technology Company a repris cet article sur son propre site, sans aucune autorisation. Par conséquent, l’entreprise Tencent a agi à leur encontre pour violation du droit d’auteur de l’IA.

Bien que l’entreprise, ayant repris l’article créé par l’IA, ait mentionné que « l’article a été automatiquement rédigé par Tencent Robot Dreamwritter », le tribunal de Shenzhen a décidé qu’il y avait quand même eu une violation du droit d’auteur et a condamné l’entreprise à s’acquitter d’une amende de 1 500 yuans, soit 195 euros, à Tencent.

Selon le raisonnement des juges chinois, la structure de l’article, créé par l’intelligence artificielle, avait été rédigée selon une logique claire et présentait une certaine originalité, ce qui lui permettait d’être protégée par le droit d’auteur. De ce fait, vu vu que l’IA est par définition pas humaine, c’est à l’entreprise qui l’a créée, que reviennent les droits d’auteur.

Il est important de souligner que cette solution va à l’encontre du raisonnement traditionnel opéré sur les œuvres de l’esprit. En effet, pour être protégé par le droit d’auteur, les juges doivent rechercher l’originalité de la création se définissant comme « l’empreinte de la personnalité de l’auteur ». Or une machine ne peut pas faire preuve d’originalité car elle n’est pas humaine.

Cependant, un argument en faveur de cette solution a pu être avancé. En effet, puisque l’IA est une création humaine alors les fruits de son travail reviennent à son créateur. Par conséquent, en l’espèce, c’est bien l’entreprise Tencent. Bien qu’il y ait cet argument en faveur de la solution rendue par le tribunal chinois, cette décision risque de vider de son sens le droit d’auteur puisque la notion d’originalité est étendue aux créations d’une IA, soit une machine. Pour le moment les autres juridictions du monde, ne semblent pas être en adéquation avec cette solution.

Sources :

 

La contrefaçon peut être retenue en cas de reproduction d’extraits d’œuvres musicales dans un livre

Par un arrêt du 19 novembre 2019, la Cour d’appel de Versailles alors juridiction de renvoi, a mis fin à un contentieux opposant les ayants droits de Jean Ferrat à l’éditeur d’un livre lui étant consacré.

En l’espèce, l’exécuteur testamentaire en charge du droit moral de Jean Ferrat, artiste-interprète et compositeur décédé en 2010, et son producteur titulaire des droits de reproduction sur l’œuvre de l’artiste, faisaient grief à une société tierce d’avoir publié un ouvrage sur Jean Ferrat reproduisant 58 de ses chansons ainsi que 60 extraits des textes. Se posait alors la question de la nature contrefaisante ou non des extraits reproduits ; la société éditrice soutenant devant la cour d’appel de renvoi que les citations dans le livre relevaient de l’exception dite de courte citation et ne pouvaient donc être interdites puisque légales.

Pour rappel, l’article L.122-5 du Code de la propriété intellectuelle dispose que quiconque peut citer des œuvres de l’esprit à condition de respecter la paternité de l’auteur et que les citations soient justifiées par « le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information de l’œuvre à laquelle elles sont incorporées ».

Dans les extraits en cause, comme nulle poursuite d’un objectif pédagogique, critique, polémique, scientifique ou d’information ne pouvait être établie à travers l’absence de critique ou d’analyse dans l’ouvrage, la cour d’appel de renvoi a, à bon droit estimé qu’ils ne pouvaient bénéficier de l’exception au droit d’auteur dite de courte citation. La reproduction dans un livre d’extraits de chansons peut difficilement être justifiable par de tels motifs lorsqu’elle s’inscrit dans un ouvrage biographique.

L’œuvre de Jean Ferrat ayant été découpée à plusieurs reprises dans l’ouvrage littéraire, sans que cela soit justifié par une exception légale, l’atteinte au droit patrimonial et au droit moral pour non respect de l’intégrité de l’oeuvre était caractérisée. La contrefaçon a ainsi été retenue et l’éditeur a été condamné.

Source :

 

La reconnaissance faciale: les appels à ralentir se multiplient

Au Think Tank Bruegel ce lundi 20 janvier, Sundar PICHAI, CEO de Google, a appelé l’Union Européenne à adopter une approche proportionnée et sectorielle pour réglementer l’intelligence artificielle et les différents gouvernements nationaux à s’aligner sur un socle de valeurs commune en la matière. L’idée principale est de parvenir à construire une « réglementation judicieuse »basée sur la recherche d’un équilibre entre « préjudices potentiels »et « opportunités au niveau social ».

Encourageant la régulation, le patron d’Alphabet renchéri : « la question n’est pas de savoir s’il faut régler, mais comment ». En effet, c’est là tout l’enjeu de la discussion. Concilier réglementation de l’intelligence artificielle et progrès de l’innovation n’est pas chose aisée. Toutefois, pour Sundar PICHAI, cette régulation est une nécessité face au déploiement, ces dernières années, des deepfakes et de la reconnaissance faciale.

D’ailleurs, en opposition avec la vision américaine assise sur la flexibilité, l’Union Européenne avait déjà fait savoir qu’elle envisageait d’interdire pendant cinq ans la reconnaissance faciale dans les lieux publics, le temps pour elle de se munir de garde-fous suffisants, particulièrement dans les secteurs des données personnelles et de la vie privée. En réalité, ce n’est pas la première fois que les aspects néfastes de la reconnaissance faciale sont pointés du doigt.

Ne reste plus qu’à attendre le 19 février prochain, date à laquelle la Commission Européenne devrait publier une liste de propositions afin de réglementer l’intelligence artificielle sur le territoire européen ; l’objectif étant d’envisager toute une série de règles pour s’assurer que ce procédé soit utilisé, quels que soient les secteurs, dans le respect des valeurs européennes.

Sources :

 

Le Collectif tient à remercier les élèves de la promotion qui ont participé à la rédaction des brèves: Camille Alary, Aurélie Baudier, Chloé Beuriot et Julie Dorville.

Le prochain rendez-vous ? Mercredi à 18h pour la publication d’un nouvel article.

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