Bonsoir, voici les brèves de la semaine. Très bonne lecture à tous !
Spotify développe son accès aux podcasts en rachetant la start-up Podz
La plateforme de streaming n’en est pas à sa première acquisition dans ce secteur. Si au mois de mars l’éditeur Betty Labs fut racheté puis revisité par la plateforme en créant des salons audios dans le domaine de la musique, de la culture et des sports, c’est au tour de la start-up Podz.
Mais alors, quelles sont les motivations derrière ces achats ? Innover afin d’améliorer la découverte de podcasts. En effet, la technologie développée par la start-up permet de mettre en place une fonctionnalité de retranscription automatique des podcasts en permettant de générer des extraits rendant plus simple la découverte de nouveau contenu par les utilisateurs. Spotify explique : « Grâce à une technologie de machine learning de pointe, Podz génère des clips de haute qualité qui permettent aux utilisateurs de visualiser les moments clés des épisodes de podcast, ce qui les encourage à découvrir et à écouter de nouveaux podcasts ».
Si les utilisateurs pourront en profiter avant la fin de l’année, on remarque que le secteur du podcast, en plein essor, fait l’objet d’une course aux changements. Cette semaine, quand Apple a annoncé son projet de lancer des abonnements payants pour Apple Podcasts, Facebook affiché sa volonté de se préparer à accueillir le format audio des podcasts sur son réseau social. Le secteur promet donc de grandes évolutions.
Pierrine CERVI
Sources :
- https://siecledigital.fr/2021/06/19/spotify-rachat-podz
- https://www.journaldugeek.com/2021/06/17/facebook-les-podcasts-debarquent-la-semaine-prochaine/
- https://www.lefigaro.fr/medias/jour-j-pour-le-lancement-des-abonnements-sur-apple-podcasts-20210615
Condamnation d’IKEA : le premier procès français de collecte de données à caractère personnel
La filiale française d’Ikea, accusée d’avoir illégalement espionné plusieurs centaines de salariés depuis 2002, a été condamnée ce mardi dans une décision très attendue, à verser une amende de 1 million d’euros pour collecte de données à caractère personnel. Cette décision intervient après huit ans d’instruction.
L’affaire débute avec le dépôt d’une plainte de l’Union départementale des syndicats confédérés Force Ouvrière de la Seine-Saint-Denis, contre la société Meubles Ikea France SAS. UD FO 93 dénonce alors « un système d’espionnage organisé » qui viserait des salariés et des clients, à l’aide d’informations issus de fichiers administratifs et judiciaires. A l’appui, des clés USB contenant des messages dans lesquels le directeur de la gestion du risque d’Ikea France demande un « feedback » ou des « antécédents » des salariés ou candidats à un enquêteur privé.
Ikea France, filiale du groupe suédois, a alors été accusée d’avoir illégalement collecté des données sur les antécédents judiciaires, le train de vie ou leur patrimoine de salariés et de clients, et ce par l’intermédiaire d’une société « en conseil des affaires » (Eirpace), qui aurait alors extrait ces données confidentielles de fichiers de police.
Durant deux semaines de débats houleux, IKEA France a été jugé aux côtés d’anciens dirigeants de l’entreprise, directeurs de magasins, fonctionnaires de police et patron d’une société d’investigation privée. Chacun s’est renvoyé la responsabilité des accusations, dont la collecte et la divulgation illicite d’informations personnelles.
L’ancien PDG, Jean-Louis Baillot, a été condamné à une peine de deux ans de prison avec sursis et 50 000 euros d’amende. Cette décision se situe en dessous des réquisitions du parquet de Versailles qui avait requis 2 millions d’euros d’amende à l’encontre de IKEA en mars dernier, et un an de prison ferme contre son ancien PDG. Concernant Jean-François Paris, l’ancien directeur de la gestion du risque dit « Monsieur Sécurité » de la filiale française de 2002 à 2012, il a été condamné à 18 mois d’emprisonnement avec sursis et 10 000 euros d’amende. Ce dernier a reconnu à la barre des « contrôles de masse » des employés.
« Ce ne sont pas des montants qui conduiront Ikea et les entreprises à changer de comportement » a réagi Maître Alexis Perrin, représentant des syndicats du Rhône. Ce dernier rappelle que l’enseigne a provisionné des millions d’euros en vue de ce « premier procès français de collecte de données ».
Ingka Groupe, qui concentre environ 90% des magasins Ikea sous franchise dans le monde, a assuré cependant prendre « très au sérieux la protection des données des salariés et clients »., L’avocat Maître Emmanuel Daoud, note le fait que des relaxes aient été prononcées, notamment pour le délit de recel de détournement d’informations personnelles. Ce dernier relève que Ikea France a mis en place des mesures telles que la restructuration de sa gouvernance, et la création d’un comité éthique.
Les 120 parties civiles ont reçu pour la majorité une indemnisation entre 1000 et 10 000 euros chacune. A l’heure actuelle, on ne sait pas encore si Ikea France et ses anciens dirigeants envisagent de faire appel.
Audrey NICOLLE
Sources :
- https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/06/15/espionnage-de-salaries-ikea-france-condamne-a-1-million-d-euros-d-amende_6084202_3224.html
- https://www.lefigaro.fr/faits-divers/epilogue-au-proces-ikea-20210615
- https://www.lsa-conso.fr/ikea-condamne-a-un-million-d-euros-d-amende-pour-espionnage,384778 (image)
Le pouvoir des autorités nationales de contrôle pour le traitement transfrontalier de données précisé par la CJUE
Depuis l’entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données (RGPD) le 25 mai 2018 s’applique en Europe le principe du « guichet unique » concernant les traitements transfrontaliers de données. Il relève de ce dernier une répartition de compétence entre une autorité dite « chef de file » et toutes les autres autorités nationales de contrôle. En effet ce mécanisme donne compétence à l’autorité de protection des données du pays dans lequel se trouve le siège social de l’entreprise responsable de traitement transfrontalier pour adopter toute décision constatant qu’un traitement transfrontalier par cette dernière méconnaîtrait le RGPD. Cette autorité de contrôle dite alors « chef de file » permet aux entreprises responsables de traitement transfrontalier d’avoir un interlocuteur unique en Europe pour contrôler ces traitements et d’avoir une seule décision valable dans toute l’Europe en cas de litige. La Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE) dans un arrêt rendu le mardi 15 juin 2021 est venu préciser le pouvoir des autorités « non-chefs de file » pour le traitement transfrontalier des données prévoyant ainsi des exceptions à l’application du guichet unique.
Cet arrêt intervient en réponse aux questions préjudicielles posées par la cour d’appel de Bruxelles dans le cadre d’un litige opposant l’Autorité de protection des données en Belgique et Facebook depuis 2015. En effet, en septembre 2015, le présidente de l’Autorité de protection des données en Belgique a saisi la justice d’une action en cessation à l’encontre de Facebook afin de mettre fin à plusieurs violations de la législation relative à la protection des données que commettait alors selon elle Facebook. En 2018 le tribunal de première instance de Bruxelles condamne en effet Facebook qui a alors interjeté appel de ce jugement devant la cour d’appel de Bruxelles.
Cette dernière se questionnant sur l’incidence de l’application du mécanisme du « guichet unique » entré en vigueur en 2018 sur la compétence de l’autorité de contrôle de données en Belgique à pouvoir agir contre Facebook, cette dernière ayant son siège social en Irlande a saisi la CJUE de plusieurs questions préjudicielles. Ces dernières visaient à déterminer si l’autorité Belge de contrôle pour le traitement de transfrontalier de données, l’ADP aujourd’hui avait bien encore aujourd’hui compétence pour agir contre Facebook faisant ainsi ici abstraction au mécanisme de guichet unique.
C’est par une réponse positive à cette interrogation que la CJUE est venue préciser le pouvoir des autorités nationales de contrôle n’étant pas chef de file pour le traitement transfrontalier de données. Cette dernière considère en effet qu’une action en justice intentée pour des infractions commises avant la date d’entrée en vigueur du RGPD peut être maintenue en vertu du droit de l’Union même quand cette dernière n’est pas intentée par l’autorité dite chef de file. La CJUE ne s’arrête cependant pas là et va plus loin en considérant qu’une telle action peut toujours être intentée « pour des infractions commises après la date d’entrée en vigueur du RGPD » dès lors que plusieurs conditions sont réunies. Il relève donc de cet arrêt de la CJUE que « sous certaines conditions, une autorité nationale de contrôle peut exercer son pouvoir de porter toute prétendue violation du RGPD devant une juridiction d’un État membre, même si elle n’est pas l’autorité chef de file pour ce traitement ».
Ainsi si la CJUE dans son arrêt affirme que le principe reste bien celui du guichet unique, elle affirme cependant que le RGPD prévoit sous certaines conditions des exceptions à ce mécanisme. Parmi ces conditions figurées notamment celle de suivre les procédures de coopération et de cohérence prévue par le RGPD et que la violation du règlement se soit produite dans le pays concerné. En effet cette décision permet ainsi aux autorités nationales de contrôle de pallier une potentielle inertie d’une autorité de contrôle chef de file qui aurait décidé de ne pas traiter le cas ou encore à son manque de coopération dans les cas où elle n’aurait pas fourni les informations demandées par une autorité de contrôle nationale ayant requis son assistance. La CJUE rappelle en effet au sein de son arrêt la responsabilité et l’obligation d’une coopération renforcée entre l’autorité chef de file avec les autres autorités de contrôles nationales. Elle affirme que « l’autorité de contrôle chef de file ne saurait s’affranchir d’un dialogue indispensable ainsi que d’une coopération loyale et efficace avec les autres autorités de contrôle concernées ». Une coopération indispensable selon la CJUE pour éviter que le mécanisme du guichet unique encourage « la pratique d’un forum shopping, notamment de la part des responsables de traitement ».
Cet arrêt aura très probablement des conséquences, l’autorité de contrôle irlandaise, chef de file des géants que sont Facebook, Apple, Google ou encore Twitter étant régulièrement critiqué par les autres autorités de contrôle nationales dues à sa lenteur et son manque de moyens. Le 20 mai 2020 le Parlement européen avait d’ailleurs voté en faveur d’une résolution demandant à la Commission européenne l’ouverture d’une procédure d’infraction contre l’Irlande pour défaut d’application du RGPD.
Florent El ABIDI
Sources :
- Règlement général sur la protection des données (RGPD) : la Cour précise les conditions d’exercice des pouvoirs des autorités nationales de contrôle pour le traitement transfrontalier de données (europa.eu)
- Facebook Ireland, guichet unique et exceptions : précisions sur les pouvoirs des autorités nationales « non-chefs de file » pour le traitement transfrontalier de données | Lexis Veille
- RGPD : la Cour de Justice lutte contre le forum shopping des géants du web – Actu-Juridique
- Europe : la Cour de justice donne plus de marge de manœuvre aux régulateurs locaux (siecledigital.fr)
L’artiste Peppone condamné pour « contrefaçon » par les héritiers d’Hergé
Jeudi 17 juin 2021 le tribunal judiciaire de Marseille a finalement jugé que les bustes de Tintin réalisés par le sculpteur Peppone, de son vrai nom Christophe Tixier, correspondraient à des contrefaçons.
Pour en revenir aux faits, Peppone est un artiste ayant notamment réalisé environ 90 bustes en résine de Tintin, recouverts de planches de la bande-dessinée du personnage, s’est attiré les foudres des ayants droits via une accusation en contrefaçon par la société Moulinsart, société anonyme chargée de l’exploitation commerciale des Aventures de Tintin imaginées par Hergé.
Cette dernière est tout particulièrement connue pour contester les nombreuses reprises du célèbre reporter à la houppette, en n’hésitant pas à assigner en justice les concernés.
Récemment, le 10 mai dernier, Moulinsart avait été débouté de ses demandes dans l’affaire liée aux peintures de Xavier Marabout, en retenant l’exception de parodie, au motif de l’article L 122-5 4° du Code de la propriété intellectuelle.
Source : Agence France-Presse
Dans l’affaire relative aux bustes réalisés par Peppone, l’avocate de ce dernier, Maître Delphine Cô, souhaitait contester les accusations de Moulinsart en remettant en question la paternité même de Tintin. Cette argumentation était basée sur un précédent lié au livre retraçant les aventures d’un personnage nommé « Tintin-Lutin », illustré par Benjamin Rabier et comportant des similitudes avec le Tintin d’Hergé. Des dessins de l’illustrateur Benjamin Rabier avaient été rapporté par l’avocate de Peppone, afin de démontrer notamment des ressemblances vestimentaires et physiques avec Tintin.
Mais il semblerait que cet argument remettant en cause l’originalité de l’œuvre d’Hergé n’ai pas convaincu les juges du tribunal judiciaire de Marseille, celui-ci ayant tranché l’affaire en affirmant que « Le personnage de Tintin, créé par Hergé (…) est une oeuvre originale au sens du code de la propriété intellectuelle ».
Le tribunal a également ajouté que « Le personnage de Benjamin Rabier montre que le personnage de Tintin, créé par Hergé, ne s’en inspire en aucune façon (…) Aucune indication n’est donnée sur le caractère, le comportement et le contexte dans lequel Benjamin Rabier a fait évoluer son personnage, de sorte que la comparaison avec le personnage de Tintin créé par Hergé est totalement dénuée de pertinence ».
Peppone a été condamné à verser plus de 100 000 € de dommages-intérêts à la Moulinsart.
Il accuse un « acharnement » de la société Moulinsart. D’autant plus que Peppone avait déjà eut affaire à cette société, mais cette dernière avait été débouté en correctionnel en 2018.
Néanmoins, le chemin judiciaire dans cette affaire des bustes représentant le personnage de Tintin ne semble pas s’arrêter pour autant, car Maître Delphine Cô, a indiqué que Peppone ferait appel de ce jugement. Affaire à suivre.
Mélinda GUREN
Sources :
- https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/bouches-du-rhone/marseille/l-artiste-aixoix-peppone-condamne-a-marseille-pour-contrefacon-par-les-heritiers-d-herge-2141014.html
- https://www.franceinter.fr/societe/pourquoi-les-ayant-droits-de-herge-attaquent-ils-systematiquement-ceux-qui-representent-tintin
- https://www.lunion.fr/id266707/article/2021-06-18/tintin-un-sculpteur-poursuivi-par-les-heritiers-dherge-condamne-pour-contrefacon
- Brève du 18 avril sur cette affaire : http://master-ip-it-leblog.fr/breves-du-12-au-18-avril-2020/
- Brève du 16 mai sur l’affaire avec Xavier Marabout : http://master-ip-it-leblog.fr/breve-du-10-au-16-mai-2021/