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La Comédie-Française poursuivie en justice par un spécialiste de Molière pour violation de droits d’auteur
Georges Forestier a intenté une action en justice contre la Comédie Française pour violation de ses droits d’auteur par la représentation de la pièce Tartuffe ou l’hypocrite. Le spécialiste de Molière allègue qu’il en est l’auteur-adaptateur.
Selon lui, l’adaptation Tartuffe ou l’hypocrite possède tous les caractères d’une création originale. En effet, il aurait fourni un véritable travail de réécriture et de mise en forme. Précisément, il a rétabli la version originelle du Tartuffe de Molière en trois actes, qui avait été censurée par Louis XIV. Par ailleurs, il a retiré deux personnages et a réécrit les derniers vers. Il aurait ainsi apporté « un objet nouveau ». La publication du texte en 2021 par les éditions Portaparole l’atteste, d’après son avocat.
La Maison de Molière a déclaré que Georges Forestier « n’est pas l’auteur de Tartuffe ou l’hypocrite » et a uniquement « restitué en tant qu’universitaire, le texte originel de Molière ».
Le Code de la propriété intellectuelle à son article L. 131-2 prévoit que la cession de droits d’auteur doit se matérialiser par un contrat écrit, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Le « quiproquo » résulterait d’un échange de mails dans lequel Georges Forestier a permis à la Comédie française de présenter « gracieusement » la pièce. Son avocat affirme que ces échanges n’ont aucune valeur juridique, puisque même en cas d’autorisation gracieuse de représentation de la pièce, il aurait fallu préciser « le nombre de représentations, la durée de l’autorisation et sa portée géographique ».
Dès lors, Georges Forestier sollicite la reconnaissance de ses droits d’auteur. Une audience de procédure est prévue le jeudi 24 novembre devant la troisième chambre civile du tribunal judiciaire de Paris.
« Le scandale du monde est ce qui fait l’offense, et ce n’est pas pécher que pécher en silence », Molière (Le Tartuffe).
Ninon VANDEKERCKHOVE
Sources :
Le projet de réforme controversé concernant le droit d’auteur en Belgique
Après avoir pris connaissance du projet de loi-programme, la Sabam (Société belge des auteurs, compositeurs et éditeurs) a annoncé que la réforme de la fiscalité sur le droit d’auteur et les droits voisins menace d’être un « désastre ».
Depuis 2008, en Belgique, les revenus des cessions et des licences de droits d’auteur sont reconnus comme des revenus mobiliers soumis à une taxation de 15%. L’objectif de cette nouvelle réforme prévue par le Ministre des finances Vincent Van Peteghem serait de limiter le régime fiscal favorable des droits d’auteur aux seuls « vrais » artistes et aux artistes-interprètes travaillant dans le secteur des arts, alors qu’aujourd’hui le champ d’application s’est élargi à d’autres professions (aux architectes et aux journalistes par exemple).
Le projet a aussi pour objectif d’introduire un ratio de droits d’auteur admissible par rapport aux revenus professionnels. En effet, les revenus de droits d’auteur, pour bénéficier du régime fiscal de taxation à 15%, seraient limités à 30% (contre 50% aujourd’hui) des revenus de l’auteur indépendant. L’Association des journalistes professionnels explique qu’aujourd’hui, « les journalistes indépendants peuvent facturer jusqu’à 50% du prix global la cession de leurs droits sur leurs productions journalistiques. Si la réforme envisagée devait passer comme telle, cela signifierait une perte nette importante pour ces auteurs du secteur des médias, en raison de l’accroissement de la pression fiscale ».
De nombreuses professions sont touchées par cette réforme, y compris les métiers liés à la programmation informatique qui ne seront plus éligibles au régime fiscal des droits d’auteur.
La Sabam explique qu’ « aux cours des dernières semaines et des derniers mois, plusieurs consultations ont eu lieu pour atteindre efficacement cet objectif et un large consensus s’est dégagé à ce sujet. Cependant, le texte qui nous est présenté conduit à une réforme complète qui sera totalement inapplicable dans la pratique et qui méconnaît le travail des auteurs et des artistes ». La société met également en avant le danger que représente cette réforme pour la sécurité juridique des auteurs et des artistes de bonne foi « qui seront une fois de plus privés de leurs revenus ».
De nombreuses organisations telles que Playright, la SACD (Société des auteurs et compositeurs dramatiques), la SCAM (Société civile des auteurs multimédia), la SOFAM et deAuteurs ont demandé une concertation urgente avec les ministres chargés de la réforme afin de pouvoir améliorer le projet.
Lili POURHASHEMI
Sources :
https://www.sabam.be/fr/press/les-vrais-auteurs-victimes-de-la-reforme-fiscale
La Cour d’appel de Paris s’oppose à un marché d’occasion des jeux-vidéos dématérialisés
Dans ce litige opposant la société américaine Valve, exploitante de la plateforme Steam proposant un service de distribution en ligne de contenus numériques, dont de jeux-vidéos téléchargeables sur l’ordinateur de l’utilisateur ayant souscrit, à UFC-Que Choisir, association de défense des droits des consommateurs, la question s’est posée de la possibilité pour les utilisateurs de revendre les jeux-vidéos dématérialisés qu’ils avaient achetés.
Le bénéfice d’un marché d’occasion des jeux-vidéos est indéniable du fait de leur coût conséquent et de l’amoindrissement de leur intérêt pour le joueur ayant terminé la partie. Toutefois, si cela est permis pour ceux disponibles sur un support physique, par un arrêt du 21 octobre 2022 la Cour d’appel de Paris s’est prononcée en défaveur d’un marché d’occasion pour les jeux-vidéos dématérialisés.
Dans cette affaire, une clause des conditions générales d’utilisation de Steam prohibait toute possibilité de céder les souscriptions acquises, souscriptions permettant aux utilisateurs de jouer à un jeu téléchargé depuis cette plateforme. Considérant qu’une telle clause portait atteinte au droit des consommateurs, UFC-Que-Choisir avait assigné la société Valve devant le tribunal de grande instance de Paris pour faire constater son caractère abusif, ce qu’il avait fait le 17 septembre 2019. La société Valve a alors interjeté appel de cette décision, arguant que la revente de jeux-vidéos dématérialisés n’est pas permise par le droit européen, et par sa transposition au sein du Code de la propriété intellectuelle.
La question qui se posait ici était celle de l’épuisement du droit de distribution concernant les jeux-vidéos dématérialisés. Balançant droit de propriété et libre circulation des marchandises au sein de l’Union, l’épuisement du droit « implique qu’une fois qu’un produit protégé par un droit de propriété intellectuelle a été mis sur le marché, par le titulaire du droit ou avec son consentement, celui-ci perd le contrôle qu’il avait sur la distribution et l’utilisation de ce produit », ce qui permet la revente d’occasion.
La directive 2009/24 prévoit cet épuisement pour les programmes d’ordinateurs, qu’ils soient mis à disposition sur un support tangible comme dématérialisé (Affaire Usedsof), tandis que la directive 2001/29 prévoit cet épuisement du droit d’auteur pour les œuvres mises à disposition sur un support tangible uniquement. Ainsi, cette dernière directive prévoit que, si les œuvres tangibles relèvent du droit de la distribution, et sont donc soumises à l’épuisement du droit, ce n’est pas le cas des œuvres dématérialisées qui relèvent du droit de communication au public (Affaire Tom Kabinet).
Alors que UFC-Que Choisir et la juridiction de première instance considéraient que les jeux-vidéos dématérialisés, étant en partie des logiciels, pouvaient se voir appliquer l’épuisement du droit prévu par la directive de 2009, et donc l’indifférence du support, la Cour d’appel de Paris rappelle que les jeux-vidéos sont des œuvres complexes qui ne sauraient être réduites à de simples logiciels (Affaire Nintendo). En effet, s’ils comprennent des composantes logicielles, ils ne peuvent être limités à un programme d’ordinateur alors que de nombreuses créations, qu’il s’agisse « des graphismes, de la musique, des éléments sonores, un scénario et des personnages », sont essentielles et font d’un jeu vidéo une œuvre originale protégée par le droit d’auteur.
De plus, elle relève que le jeu vidéo se retrouve rapidement sur le marché une fois terminé puisqu’il peut être utilisé par de nouveaux joueurs après sa création, contrairement à un programme d’ordinateur destiné à être utilisé jusqu’à son obsolescence. De ce fait, les conséquences d’un marché d’occasion des copies immatérielles d’un jeu vidéo sur les titulaires de droit d’auteur sont bien plus importantes que celles de celui d’un marché des programmes d’ordinateur.
Ainsi, les dispositions concernant les logiciels, et portant l’indifférence du support, ne s’appliquent pas, et les jeux-vidéos sont soumis à la directive 2001/29 qui exclut l’épuisement pour les œuvres mises à disposition sur un support immatériel.
La juridiction fait ici le choix d’une protection des auteurs, qui se verraient privés de conséquents bénéfices si leurs jeux étaient revendables à l’infini, au détriment des consommateurs, qui ne peuvent transposer leur comportement dans le monde physique au monde digital.
Esther PELOSSE
Sources :
Cour d’appel de Paris, Pôle 5, Chambre 2, 21 octobre 2022, n° 20/15768
Livre vert sur le Droit d’auteur dans la société de l’information, 1995, Doc. COM (95), 382 final, p. 47
Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information
Directive 2009/24/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur
Code de la propriété intellectuelle
Pierre Arhel, Propriété intellectuelle : OMC – Principes fondamentaux, Répertoire de droit international, Chapitre 1, Section 3, Janvier 2019
https://www.lebigdata.fr/steam-revente-jeux-video
La finalisation du rachat de Twitter par Elon Musk
« L’oiseau est libéré » : c’est par ce tweet que le célèbre milliardaire Elon Musk marque son acquisition officielle du réseau social Twitter, ce jeudi 27 octobre.
Ce n’était pourtant pas bien parti dans l’affaire Twitter-Musk.
Alors que l’entrepreneur avait conclu un accord pour acquérir le réseau social Twitter en avril dernier, il s’était rétracté trois mois plus tard pour soupçon de rétention d’informations sur le nombre de faux comptes sur la plateforme, constituant selon lui une violation des obligations de la société dans le cadre de son offre de rachat. En effet, la société assurait que ces comptes représentaient moins de 5% des comptes enregistrés, mais après avoir procédé à une analyse des données, Elon Musk n’en tirait pas la même conclusion et estimait qu’ils représentaient plutôt 20% des utilisateurs.
À la suite de cette rétractation, le Conseil d’administration de la société avait formé une action en justice à l’encontre de l’entrepreneur. La justice de l’État américain Delaware avait prononcé une suspension de la procédure afin de contraindre Elon Musk d’honorer l’accord d’acquisition ; il avait ainsi jusqu’à ce vendredi 28 octobre pour finaliser l’opération selon les conditions et prix prévus dans l’offre, à défaut de quoi le procès initialement prévu le 17 octobre aurait lieu au mois de novembre.
C’est finalement la veille de la date limite fixée que Elon Musk décide d’honorer sa promesse, après avoir notamment convaincu une vingtaine de ses investisseurs, et conclut la transaction au prix initialement convenu : 44 milliards de dollars, soit 54,20 dollars l’action.
De nombreux changements sont attendus. Alors que le nouveau propriétaire de Twitter se sépare déjà de trois des dirigeants de la société, dont le PDG Parag Agrawal, ce ne serait que le début puisqu’il aurait déclaré à des investisseurs qu’il comptait licencier, à terme, près de 75 % des 7 500 employés de Twitter, selon un article du Washington Post. Une toute nouvelle organisation qui risque de faire du bruit…
Des questions sur la liberté d’expression sur la plateforme sont également soulevées. Alors que le nouveau propriétaire du réseau social prône pour une liberté d’expression absolue et croit en une « une place publique numérique commune, où un large éventail de croyances peut être débattu de manière saine, sans recourir à la violence », il affirme dans un tweet que « Twitter ne peut évidemment pas devenir un terrain de jeu où tout peut être dit sans conséquences ». On peut néanmoins se questionner sur un possible assouplissement des règles de modération des contenus et de fait, l’anéantissement de tous les efforts entrepris par l’entreprise pour lutter contre la désinformation et les propos haineux. À lui de prendre garde à ne pas se heurter aux législations européennes et nationales.
Louise FOUQUET-CRISTOFINI
Sources :
https://twitter.com/elonmusk/status/1585619322239561728/photo/1
https://www.washingtonpost.com/technology/2022/10/27/twitter-elon-musk/